mercredi 18 juin 2014

CIMETIERE MONTPARNASSE (4) - PARIS XIVe arrondissement.

On ne saurait évoquer le cimetière Montparnasse sans citer Charles Baudelaire (1821-1867).
Ce poète immense est deux fois présent  dans le cimetière. En effet, il y a sa vraie tombe qu'il partage avec sa mère et son beau-père, le général Aupick et son cénotaphe érigé bien après sa mort en 1902.

La tombe. Elle se trouve dans la 6ème division en bordure de l'avenue de l'Ouest. La présence des deux femmes sur la photo n'est pas fortuite. Il s'agit de deux américaines qui ne parlaient pas français, mais qui cherchaient la tombe du poète.
On en est amené à se demander comment les étrangers peuvent ressentir la poésie très musicale de Baudelaire.
Voici un exemple de poème extrait des Fleurs du mal : la première strophe du sonnet "la Beauté".
Je suis belle, ô mortels! comme un rêve de pierre,
Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,
Est fait pour inspirer au poète un amour
Eternel et muet ainsi que la matière.


Et voici une traduction en anglais (de Roy Campbell) :
I'm fair, O mortals, as a dream of stone;
My breasts whereon, in turn, your wrecks you shatter,
Were made to wake in poets' hearts alone 
A love as indestructible as matter.

Et une autre (de Lewis Piaget Shanks) :
fair as a dream in stone I loom afar
— mortals! — with dazzling breast where, bruised in turn
all poets fall in silence, doomed to burn
with love eternal as the atoms are.

Le première traduction perd les rimes et les alexandrins mais garde en revanche un sens très proche de l'original. En revanche, la deuxième version reconstruit des rimes alors que le sens est largement altéré.
Et que dire du rythme et de la musique !
Cela reste un peu mystérieux surtout pour quelqu'un qui ne maîtrise pas vraiment la langue anglaise.

Pour en revenir à nos Américaines, elles n'en sont pas restées là. Elle ont cherché ensuite le cénotaphe.
Celui-ci est placé au bout de l'allée Transversale contre le mur contigu à la rue Emile Richard. Il fit l'objet d'une longue polémique qui dura dix ans entre le lancement de la souscription et l'aboutissement du projet.
Il est l'oeuvre du sculpteur de José de Charmoy et représente un gisant  enroulé dans des bandelettes tel une momie. Au-dessus, un personnage (représentation de Baudelaire lui-même?) le menton appuyé sur les poings fermés regarde le lointain inaccessible aux simples humains que nous sommes.
         

"Le tombeau, confident de mon rêve infini
(Car le tombeau toujours comprendra le poète),
Durant ces grandes nuits d’où le somme est banni"

(premier tercet du sonnet "Remords posthume")

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