vendredi 25 janvier 2013

LA RUE VISCONTI - PARIS - VIème arrondissement.

Entre la rue Bonaparte et la rue de Seine (6e arrondissement)

Cette rue se nommait jadis rue des Marais ou des Marais-Saint-Germain. Étroite et sombre, elle ne semble pas receler grand intérêt. Pourtant, son histoire est riche et plusieurs maisons qui la bordent ont abrité des personnages célèbres.
Les protestants y tinrent leur premier synode national en 1559. On appela même cette rue "petite Genève" pour les nombreux membres de cette communauté qui la fréquentaient.
Plus tard, ce sont des gens de théâtre qui y demeurèrent.
Au n°24, Jean Racine vint y habiter en 1692 et y resta jusqu'à sa mort en 1699. 

Cinquante ans plus tard, Claire-Hippolite Léris, dite Mademoiselle Clairon, comédienne, s'installa à son tour au même endroit. C'était une sociétaire de la Comédie-Française qui d'après ses contemporains, atteignit la perfection de jeu; elle travaillait chaque vers et même chaque mot durant des heures pour avoir une diction parfaite.





Entre temps, au n°20, habita une autre comédienne : Marie-Anne de Chateauneuf dite Mlle Duclos. Celle-ci avait commencé sa carrière en 1693, et connaissait un grand succès. Belle, bien en chair, blanche de peau, elle avait aussi des moeurs assez légères. 
Elle hérita une assez confortable fortune du marquis de Coislin.
C'est dans le logement qu'elle occupait dans l'actuelle rue Visconti, qu'elle se trouva impliquée dans une curieuse aventure qui reste un mystère. Elle fut amenée à aider et héberger un jeune homme, le chevalier de Morsan, dont on ne peut douter qu'elle fut la maîtresse. Hélas! Au bout de quatre ans, le jeune homme mourut de la variole. Or, sept ans plus tard, Marie-Anne Duclos fut appelée à témoigner sur le fait que ce jeune chevalier aurait été une femme. En fait, un homme recherchait son épouse enfuie et après enquête en était arrivé à la conclusion qu'elle s'était cachée sous le pseudonyme de Morsan. Le tribunal ne put se résoudre à rouvrir le tombeau pour vérifier la chose. Le mystère reste entier quoiqu'on puisse supposer que Mlle Duclos avait certainement succombé aux attraits des amours saphiques. 
Plus tard, elle fut le sujet d'un autre scandale, puisqu'elle épousa à près de 50 ans, un jeune comédien de 17 ans. Evidemment, il ne tarda pas à la maltraiter et à la tromper. Elle s'enfuit donc du domicile conjugal. Evidemment, le jeune époux se trouvant soudain matériellement très démuni, tenta de la récupérer par les voies judiciaires. Malheureusement pour lui, son épouse eut suffisamment de relations pour se tirer d'affaire.
Il semble que lorsqu'elle mourut en 1748, elle ne lui laissa presque rien en héritage. Il ne lui survécut que 2 ans.

J'ai tiré de la vie de cette artiste une histoire que chacun pourra découvrir en cliquant : ici

Le n°16 fut, quant à lui, occupé par la principale rivale de Marie-Anne Duclos, Adrienne Lecouvreur. Cette dernière avait complètement modifié la façon d'interpréter la tragédie, à savoir qu'elle ne déclamait plus d'une voix forte, mais qu'elle disait ses rôles avec grande émotion. Elle connut un grand succès et fut la maîtresse de Maurice de Saxe, maréchal de France. Elle mourut en 1730 dans des conditions mystérieuses qui firent jaser, certains accusant Marie-Anne Duclos d'en être à l'origine. En vérité, elle était d'une santé fragile.
Les deux rivales étaient également admirées de Voltaire qui décidément, adorait les comédiennes.

Le n°21 est un hôtel construit en 1713 pour le lieutenant-général et marquis de Rannes.
Il fut surtout la demeure et l'atelier du peintre Constant Le Breton de 1926 à sa mort en 1985. Celui-ci portraitiste renommé, vécut une anecdote curieuse pendant l'occupation : un officier allemand, sculpteur dans le civil, l'avait contacté pour visiter son atelier. Or, cet officier voulut aussi lui montrer une oeuvre sur laquelle il travaillait. Le Breton se trouva emmené en voiture de la Wermacht sous les yeux du concierge, qui affolé, se précipita pour avertir l'épouse du peintre que son mari avait été arrêté. 

On peut continuer la liste des célébrités avec Balzac qui installa au 17, une imprimerie qui périclita rapidement. Ce fut quelques années plus tard, Eugène Delacroix qui s'installa dans ce bâtiment, de 1836 à 1844, avant d'émigrer plus tard, en 1857, rue de Furstenberg tout près d'ici.
La romantique rue de Furstenberg
Bien d'autres personnalités moins célèbres, on habité cette rue et les citer toutes serait fastidieux.
Le n°14 s'ouvre sur une cour dont le fonds est occupé par une maison au décor en bas-relief. Avant d'arriver dans cette cour, on passe sous un porche soutenu par de belles poutres. A cet emplacement, se trouvait l'hôtel de le Rochefoucault-Liancourt détruit lors du percement de la rue des Beaux-Arts, juste derrière.








Au n°8, une autre curiosité de cette rue est le plus petit espace vert de Paris. Il mesure 80m² et est occupé par un vénérable érable sycomore.

Mais au fait, qui était Visconti? C'était un architecte (1791-1853) qui conçut ou restaura plusieurs fontaines parisiennes (Saint-Sulpice, Molière, Gaillon, etc..) mais également le tombeau de Napoléon Ier aux Invalides.

N.B. : les traces blanches qui peuvent apparaître sur certaines photos sont des flocons de neige. Oui, je n'hésite pas à braver les pires intempéries pour rapporter des photos.

Un coup d'oeil sur l'érable sycomore après le dégel et surtout avec des feuilles sur ses branches.
Les travaux de nettoyage de l'immeuble au fond sont terminés. C'est quand même plus sympa!

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